Coordination

Emmanuelle Annoot, Université de Rouen
Elsa Chachkine, Conservatoire national des arts et métiers
Maryvonne Charmillot, Université de Genève


Texte de cadrage

L’objet de ce symposium est de porter un regard critique sur les dispositifs de formations et d’accompagnement doctoraux, qui ont été conçus ces dernières années pour répondre aux exigences de professionnalisation des apprentis-chercheurs. Notamment, il analysera la manière dont les concepteurs des dispositifs se sont emparés de la question de la professionnalisation des doctorants. 

En portant une attention particulière aux transformations de ces dispositifs et à leurs effets, il prolongera la réflexion engagée par le symposium de Namur intitulé : Recherche, expertise et engagement : figures contemporaines de l’universitaire (Annoot & De Ketele, 2021). Ce sont les formes d’engagement des universitaires qui seront réinterrogées dans ce nouveau symposium à partir des intentions et des valeurs portées par les dispositifs de formation et d’accompagnement doctoraux qu’ils contribuent à élaborer.

Ce symposium qui porte sur les dispositifs de formation doctorale se place aussi dans la continuité d’une recherche internationale sur l’accompagnement doctoral qui a bénéficié d’un financement LabEx HaStec. Cette recherche a donné lieu à une journée d’étude internationale organisée au Cnam le 3 juin 2021 et à la publication d’un numéro spécial sur l’accompagnement doctoral dans RIPES (https://doi.org/10.4000/ripes.4404) qui a réuni des chercheurs de quatre pays de la francophonie. Dans cette précédente recherche, l’équipe s’était surtout intéressée à la professionnalisation des enseignants du supérieur pour que ces derniers offrent aux doctorants un accompagnement expert (Chachkine, 2023). 

Or les superviseurs ou directeurs de thèse ne sont plus les seuls à accompagner les apprentis-chercheurs dans la construction de leur posture de chercheur, pour les professionnaliser aux métiers de chercheur ou encore pour les aider à développer des compétences transférables et valorisables hors du champ académique. L’exigence de professionnalisation des doctorants, en Europe sous l’impulsion du processus de Bologne, en France avec les arrêtés sur le doctorat de 2016 et 2019, ou encore au Canada avec le développement des doctorats professionnels, a nécessité de « (re)penser » les dispositifs de formation doctorale. Les dispositifs doctoraux peuvent inclure des formations, une socialisation à la recherche, une valorisation d’activités de recherche ou encore des accompagnements par d’autres chercheurs que le superviseur ou le directeur de thèse. 

Nous souhaiterions, dans le cadre de ce symposium, porter un regard évaluatif sur les dispositifs doctoraux, sachant que par « dispositif » nous entendons « un agencement intentionnel, stratégique et finalisé d’humains et d’artefacts » (Albero, 2022, p. 136) sous-tendu de trois dimensions interdépendantes constamment à l’œuvre : l’idéel, le fonctionnel de référence et le vécu. Le collectif de chercheurs du symposium cherchera à évaluer les dispositifs de formations et d’accompagnement doctoraux dans leur triple dimension, idéelle – dimension qui fournit l’horizon à la fois idéal et conceptuel vers lequel tend le projet » (Albero, 2010b, p. 93) –, fonctionnelle – qui « correspond à la mise en acte du dispositif » (2010a, p. 8) –, et vécue, autrement dit à partir de l’« expérience doctorale » (Berthiaume et al., 2020) qui permet de mettre en évidence le caractère multidimensionnel du doctorat.

Cette conceptualisation donne un outil pour entrer dans l’appréhension de possibles tensions, divergences, mais aussi convergences qui se développent au sein de chacune des trois dimensions et entre elles. En cela, le regard évaluatif porté sur les dispositifs pourra être saisi comme une activité de fonction critique qui consistera à questionner la valeur d’une action en vue de confirmer, d’ajuster, voire de modifier radicalement l’action entreprise (Mercier-Brunel & Jorro, 2022). Autant de pistes qui peuvent conduire vers une meilleure compréhension des dispositifs, de leurs réussites et de leurs échecs et vers une amélioration de l’action.


Liste des références bibliographiques

Albero, B. (2010b). De l’idéel au vécu : le dispositif confronté à ses pratiques. Dans B. Albero et N. Poteaux (dir.), Enjeux et dilemmes de l’autonomie. Une expérience d’autoformation à l’université. Etude de cas (p. 67-94). Les éditions de la Maison des Sciences de l’Homme. 

Albero, B. (2022). Dispositif. Dans A. Jorro (dir.) Dictionnaire des concepts de la professionnalisation (2e éd. actualisée) (p. 135-139). De Boeck Supérieur.

Annoot, E. et de Ketele, J.-M. (2021). Recherche ou expertise en enseignement supérieur : des postures et des identités à construire. Louvain la Neuve : Éditions Academia.

Berthiaume, D., Bosson, M., Elston, V. et Skakni, I. (2020). L’expérience doctorale : état des lieux et propositions de structuration. Fribourg : DevPro.

Chachkine, E. (2023). Accompagnement doctoral. De l’écriture de recherche à la professionnalisation des doctorants. Revue internationale de pédagogie de l’enseignement supérieur, RIPES39(1).https://journals.openedition.org/ripes/4404

Mercier-Brunel, Y. & Jorro, A. (2022). Évaluation. Dans A. Jorro (dir.), Dictionnaire des concepts de la professionnalisation (pp. 197-200). De Boeck Supérieur. DOI : 10.3917/dbu.jorro.2022.01.0197.


Contributeurs et contributrices

Céline Mahieu, Université de Rouen Normandie ; Emmanuelle Annoot Université de Rouen ; Elsa Chachkine, Conservatoire national des arts et métiers ; Jamila Al-Khatib, Conservatoire national des arts et métiers ; Natacha Dangouloff, Conservatoire national des arts et métiers ; Fabienne Saboya, Conservatoire national des arts et métiers ; Claudine Valérie Rouamba-Ouedraogo, Université Joseph Ki-Zerbo, Ouagadougou/IHEID, Genève ; Maryvonne Charmillot, Université de Genève ; Catherine E. Déri, Université du Québec en Outaouais ; Émilie Tremblay-Wragg, Université du Québec à Montréal ; Cynthia Vincent, Université du Québec à Montréal ; Ève Lejot, Université du Luxembourg ; Christelle Lison, Université de Sherbrooke ; Cécile Plaud, ENSTA Bretagne ; Catherine Adam, ENSTA Bretagne ; Line Fischer, Université de Namur ; Marc Romainville, Université de Namur ; Isabelle Skakni, Haute école spécialisée de Suisse occidentale ; Nata Kereselidze, Haute école spécialisée de Suisse occidentale.